Lundi, 10 Octobre 2011 21:34

persepolisLe ministère français des Affaires Etrangères défend officiellement Nessma TV. Il s’est même fendu d’un communiqué (disponible sur le site France Diplomatie) plutôt virulent, qui tranche résolument avec ceux que la France distillait à l’égard de Ben Ali.

Le ministère français des Affaires Etrangères «déplore et condamne l’usage de la violence par des manifestants à l’encontre du siège de la chaîne de télévision Nesma». Et «la France se félicite que cet acte de violence suscite une large réprobation des mouvements politiques tunisiens et des autorités de transition».

Les autorités françaises rappellent également leur «attachement à la liberté d’expression, au pluralisme et à la liberté de la presse en Tunisie». Soulignant que «c’est dans ce cadre que la France mène des actions de coopération et des opérations d’assistance technique avec les médias tunisiens, particulièrement dans le secteur de l’audiovisuel».

A noter que Persepolis, dont la diffusion par Nessma TV a suscité une véritable tempête est effectivement un film français. Il a été réalisé par un Français, Vincent Paronnaud, sur la base de la bande dessinée de Marjane Satrapi, elle-même française, d’origine iranienne. Et c’est également en France, que Persepolis a été récompensé au Festival de Cannes en 2007, et par les Césars en 2008. Et au-delà de ses qualités picturales certaines, on remarquera que ce long-métrage d’animation n’a pas grand-chose à voir avec la vision du monde de cinéastes iraniens comme le brillantissime Abbas Kiarostami. Et on aura du mal à déceler dans Persepolis une quelconque parenté avec la pétulance des œuvres des sœurs Makhmalbaf.

C’est que le cinéma iranien, malgré (ou grâce, selon le point de vue) le régime des Ayatollah, a su brillé de mille feux en effectuant des razzias de prix dans les festivals internationaux. Pendant que le cinéma tunisien, celui-là même qui a été largement financé par des producteurs européens en général, et français en particulier, n’a pas vraiment répondu aux attentes de nos concitoyens. Une litote doublée d’une évidence, inutile donc de tirer sur les ambulances.

Mais une chose est sûre : Persepolis, qui offre une vision cauchemardesque de l’Iran, n’a pas grand-chose de persan. Il pourrait plutôt s’inscrire dans la lignée de films comme «Jamais sans ma fille» qui ont servi à peindre le diable sur la muraille de l’Empire du Mal. Or justement, l’écrasante majorité des Tunisiens, n’ont pas nécessairement la même vision des choses. Ils ne zooment pas sur les mêmes scènes. Notre regard est différent. C’est d’ailleurs peut-être pour cela que les œuvres de nos réalisateurs, même quand elles sont financées par la France, sont cantonnées sous la rubrique «Un certain regard».

Et voilà donc que la France, qui a estimé utile de proposer à Ben Ali son savoir-faire répressif lors de la Révolution, et dont les présidents successifs ont élégamment déclaré que le «premier des droits de l’Homme, c’est de manger», (et qu’à ce titre, on ne pouvait sans doute pas parler la bouche pleine), en arrive à faire son cinéma. Ce communiqué dégainé par la diplomatie française prétend certainement défendre «une certaine idée de la France» en s’immisçant ainsi dans les affaires tunisiennes. Mais visiblement, du côté de l’Hexagone certains ne veulent toujours pas arrondir les angles. Animés par quelque sombre dessein, ils estiment avoir un droit de regard sur la rue tunisienne. Qu’on se le dise : il arrive aussi aux Satrapes de se tromper de film.

Marwene El Gabsi

Quand la France défend Nessma TV
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