Samedi, 27 Décembre 2014 19:25

Un panneau publicitaire vantant les mérites de Coca-Cola a été érigé devant la statue d’Ibn Khaldoun, au centre-ville de Tunis, en pleine avenue Habib Bourguiba, dissimulant en partie le monument. Une vision que M. Kamel Riahi, le romancier et directeur de la maison de culture Ibn Khaldoun,  n’a guère appréciée.

Durant trois jours, il protestera des heures durant au cœur de la capitale, contre ce qu’il considère comme «une humiliation à l’égard de notre culture nationale».

Une prise de position qui lui vaudra même, à ses dires, d’être victime d’une agression. Mais il ne lèvera pas le camp. La société commerciale finira par céder devant l’insistance persistante de l’homme de culture. Le panneau sera enlevé, le vendredi 26 décembre. La statue en question, sculptée par l’artiste Zoubeir Turki sur la demande de l’ancien président Habib Bourguiba en 1978, représente Ibn Khaldoun, l’un des pères de la sociologie, un historien dont l’œuvre est jusqu’à nos jours étudiée, commentée, analysée. L’auteur des «Prolégomènes» (Al Muqaddima) est donc clairement l’un des symboles les plus brillants de la culture tunisienne.

La statue, érigée au centre de Tunis, l’expose en turban, et en burnous, tenant à la main un livre. Une œuvre d’art qui met en valeur, le mariage de la raison et  de l’authenticité enracinée dans des millénaires d’histoire. Serait-elle malmenée par le bulldozer du marketing échevelé? Voici, en tous cas, qu'elle trouve des défensrs.

Le geste de M. Riahi, l’un des premiers du genre, en Tunisie, pourrait être considéré comme une victoire de la culture contre l’un des porte-drapeaux du mercantilisme mondialisé. Une résistance portée par un intellectuel contre l’ordre marchand qui entend imposer ses clinquantes valeurs importées.

A noter que Coca-Cola, qui a lancé une campagne marketing particulièrement agressive en Tunisie, a dû faire face, ces derniers mois, à un large mouvement de boycott en Europe. Dans un pays comme l’Espagne, les ventes de la boisson gazeuse d’origine américaine ont même chuté de 50% en février 2014 par rapport au même mois de l’année précédente (voir ici).

De son côté, l’écrivain égyptien Ibrahim Sonallah a même ironiquement considéré Coca-Cola, dans son roman «Le comité» (al lajna) comme l’incarnation de l’idéologie mondiale dominante. Reste à savoir si le microcosme de l’intelligentsia tunisienne saura apprécier à sa juste mesure le geste de M. Riahi, dans un contexte où la culture fait plus que jamais figure de parent pauvre.

Soufia Ben Achour

Ibn Khaldoun éjecte Coca-Cola
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