Mardi, 22 Octobre 2013 12:00

Plus de 2,3 millions d’internautes ont écouté ce morceau sur la page où il a été initialement posté sur  YouTube, en à peine un mois. Sans compter les centaines de fois où cette chanson a été téléchargée, et rediffusée sur les réseaux sociaux. Un signe qui ne trompe pas.

L’hymne concocté par Hamzaoui Med Amine et Kafon est devenu un véritable phénomène de société. Il n’aura pourtant pas bénéficié des médias de masse classique. La télévision l’aura zappé, alors que la bande fm ne lui accordera que quelques passages, entre deux spots publicitaires. Qu’importe. Encore une fois, la scène émergente aura prouvé que même le blackout médiatique ne saurait arrêter la déferlante.

Le clip met en scène les visages fanés et la misère ordinaire de nos quartiers populaires, avec la révolte qui couve, incandescente, sous la cendre, du désespoir. Les images du clip ont été filmées dans les profondeurs de l’Ariana, le quartier de Hamzaoui, bien loin des zones huppées qui font le bonheur des spéculateurs immobiliers.

Les rythmes chaloupés du reggae donnent le ton. Pour ceux qui l’auraient opublié, le roi Bob est chez lui, en Tunisie. La voix traînante de Kafon s’unit aux échos dubstep pour délivrer le message de «Houmani». Un néologisme (encore un), tout droit sorti de l’univers du rap tunisien, qui finira par se répercuter sur la Toile, avant d’envahir les discussions.

«Houmani» ? Selon Thameur Mekki, du collectif de défense de Weld El 15, Klay BBJ, et autres rappeurs tunisiens en rupture de ban, il s’agit de «ceux qui sont d’abord avant et avant tout attachés à leur ‘‘houma’’, leur quartier.  Le faisant passer devant toute filiation à un parti, race, club ou idéologie». Ces mêmes quartiers, aux quatre coins de la République, dont les fils se sont levés, armés de gourdins, pour protéger la dangereuse naissance de la Révolution dans les nuits de janvier 2011, avec pour seul fond sonore, les rafales de Steyer.

La chanson ne laisse pas les Tunisiens indifférents. Certains se disent allergiques à la simplicité apparente de ces mots. D’autres en feront un hymne, mettant en cause la fracture qui ne cesse de s’élargir entre de pseudos-élites avec les conditions sociales dans lesquelles se débattent la majorité. L’usage d’un vocabulaire brut et sans fioritures à l’eau de rose dérange dans un contexte encore marqué par la domination sirupeuse de la variétoche libanaise que l’on croyait (trop vite) avoir enterrée. Avec quelques réminiscence de zandali, ce genre de mezoued poussé à la diable, en milieu carcéral. La cornemuse sera même appelée en renfort, dans «chaqchaq», une autre chanson de Kafon, diffusée alors qu’il croupit encore en prison.

Mais l’underground tunisien ne saurait longtemps rester confiné derrière les barreaux que l’art officiel et les autorités, toujours en retard d’une bataille, lui ont assignés. Pour ceux qui l’auraient oublié, c’est bien la déflagration du Général qui avait su capter l’air du temps, alors que les artistes de la cour ronronnaient. Pourront-ils aujourd’hui mettre une sourdine à la bande-son de la Révolution ?

Moez E.K

Du zandali au phénomène 7oumani
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