Samedi, 03 Novembre 2012 14:36

attaque-benghaziLors de sa visite aux Etats-Unis, Hédi Ben Abbes, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, a fait part des soucis de la Tunisie de coopérer avec les enquêteurs américains en marge de l’attaque qui a visé le consulat des États-Unis  à Benghazi. Mais Ben Abbes interpelle aussi les USA : «les États-Unis permettraient-ils à des enquêteurs étrangers à interroger un citoyen américain sur le sol américain» ?

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Des agents du FBI sont arrivés en Tunisie pour assister à l'interrogatoire d'un Tunisien soupçonné d'être impliqué dans l'attaque du 11 septembre 2012, qui a visé le consulat des États-Unis  à Benghazi, et qui a causé la mort de Christopher Stevens, l’ambassadeur américain en Libye. Un magistrat tunisien a en effet autorisé les Etats-Unis de faire usage de leurs «techniques et savoir-faire» pour interroger de «présumés terroristes».

Deux sénateurs américains républicains, Lindsey Graham représentant la Caroline du Sud et Saxby Chambliss de la Géorgie, avaient affirmé que si les agents US ne pouvaient accéder au suspect, cela pourrait altérer les relations entre les deux Etats et pourrait se traduire par une coupure de l'aide US à la Tunisie. Les deux députés ont finalement salué vendredi la décision des autorités tunisiennes.

Hédi Ben Abbes, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères chargé de l’Amérique et de l’Asie, dont les propos ont été rapportés par Bloomberg a déclaré vendredi 2 novembre que «l’action de la Tunisie reflète la décision prise au plus haut niveau à coopérer avec les Etats-Unis dans de nombreux domaines». Ben Abbes a souligné, en se référant aux positions prises par Barack Obama que «les Tunisiens n’oublieront jamais le soutien que les États-Unis ont exprimé dès le début de la Révolution lorsque les autres nations étaient hésitantes».

benabbesToujours selon la même source, M. Ben Abbes a déclaré «Nous ne pouvons lutter contre terrorisme international seuls», précisant que «les forces de police tunisiennes sont en sous-effectifs et sous-équipées». Mais voici que la Tunisie recevra des Etats-Unis, dans une à deux semaines, une livraison de matériel anti-émeute, et une aide à la formation des forces de la police tunisiennes.

Cependant, M. Ben Abbes a affirmé que «permettre aux enquêteurs américains d’interroger un citoyen tunisien sur le sol tunisien est une question sensible qui touche à des questions de souveraineté». Il précise : «nous étions un peu réticents», relevant que «les Tunisiens se posent la question de savoir si les États-Unis permettraient à des enquêteurs étrangers à interroger un citoyen américain sur le sol américain».

«Dans le système juridique tunisien, la décision dépend du juge d'instruction, et non du gouvernement ou du ministre de la justice» a rappelé Ben Abbes, en ajoutant : «on va s'efforcer de coopérer sans faire de problème».

Quelles preuves contre le suspect ?
Le suspect qui fait l’objet de toutes ces discussions n’est autre qu’Ali Harzi, un Tunisien de 28 ans, qui a été arrêté à l'aéroport d'Istanbul dans les jours qui ont suivi les attaques du 11 septembre sur le Consulat des États-Unis à Benghazi. Ali Harzi s’est fait remarquer en publiant sur Facebook des informations sur l'attaque peu après son déclenchement. Il a été expulsé de Turquie le 11 octobre, et a été remis au gouvernement tunisien. Harzi voyageait avec un autre homme. Mais ce dernier a été relâché faute de preuves, mais reste sous la surveillance des autorités tunisiennes.

Mais Anwar Ouled Ali, l’avocat de Harzi ne voit pas l’affaire sous le même angle. Dans une déclaration faite le 1er novembre et rapportée par l'Associated Press, il affirme en effet qu’il n’y a «aucune preuve solide contre son client», considérant qu'il est utilisé comme un «bouc émissaire pour satisfaire les Américains». L’avocat affirme que son client a dit avoir été inculpé pour «appartenance à une organisation terroriste» et qu’il est «passible de six à 12 ans de prison s'il en arrive à être condamné».

L’affaire est d’autant plus délicate, que selon les révélations publiées vendredi par le Wall Street Journal, seuls sept des 30 responsables américains évacués de Benghazi à la suite de cette attaque étaient réellement des diplomates. Plus d'une vingtaine de membres de la CIA opéraient en secret dans un bâtiment annexe du consulat. Deux d’entre eux ont trouvé la mort lors de l’attaque. Pis : selon le très sérieux journal américain, «des problèmes de communication entre la CIA et le département d'Etat»  pourraient être à l’origine du massacre.

Les réserves tunisiennes
A cet égard, Ben Abbes rappellera que les «autorités tunisiennes ont demandé, depuis quelques semaines, à l'ambassadeur américain à Tunis, de partager toute preuve que les États-Unis possèdent contre Ali Harzi». Il a confirmé que les responsables américains ont dit avoir identifié le suspect comme ayant participé à l’attaque du consulat Benghazi grâce à une «technologie de reconnaissance faciale».

Or Ben Abbes relèvera qu’une photographie « n'est pas une preuve suffisamment solide pour déclarer un suspect coupable», soulignant que «les autorités tunisiennes auront besoin de plus  qu’une reconnaissance faciale».

«Deux ans plus tôt, sous le régime dictatorial de Ben Ali, les forces de sécurité tunisienne auraient jeté Ali Harzi en prison pour des siècles. Maintenant, nous ne pouvons plus le faire parce que la Tunisie est devenue une démocratie qui respecte la primauté du droit» a martelé Hédi Ben Abbes, précisant qu’il n’est «pas encore clair si les enquêteurs du FBI interrogeront directement le suspect, ou s’ils passeront par le biais de leurs homologues tunisiens».

Synth Bloomberg, Afp

Tunisie : Jusqu’à quel point coopérer avec le FBI ?
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