Dimanche, 05 Février 2012 17:34

facebook tunisieL’annonce officielle du renvoi de l’ambassadeur syrien en Tunisie a d’abord été publiée, en ce samedi 4 février, sur Facebook. Ce sera sans doute la première fois dans l’Histoire des relations internationales, qu’un Etat souverain  choisira un réseau social dépendant d’une société (américaine) privée, pour annoncer la rupture de ses relations diplomatique avec un autre pays.

Mark Zuckerberg aurait-il pu imaginer que son portail web allait servir de vecteur privilégié de communication pour des Etats indépendants? Difficile à croire. Mais Facebook occupe certainement une place à part en Tunisie. Certains manifestants ont même inscrit des messages de remerciements à l’égard de M. Zuckerberg, sur leurs banderoles, le 14 janvier. Parce que les Tunisiens se sont servis des réseaux sociaux pour transmettre au monde, les images des massacres de Thala et de Kasserine, une manière de briser le verrouillage médiatique de Ben Ali. Les Syriens en savent quelque chose, eux, qui passent aujourd’hui par les mêmes canaux, pour faire parvenir les images de leur désespérance et de leur souffrance aux internautes de la planète.

Mais si le réseau social présentait des avantages certains pour contrecarrer le blackout, est-il encore, après la Révolution, le canal le mieux indiqué pour des partis politiques au pouvoir, et a fortiori pour des gouvernements ?

Présidence tunisienne accro à Facebook
presidence tunisieDes petits malins auront même relevé que le président de la République, M. Moncef Marzouki, est accro à Facebook. Une photo l’ayant prise sur le vif alors qu’il accueillait un visiteur de marque, montre même sa page préférée sur son écran d’ordinateur.

On aura noté que les services de la présidence mettent ainsi en ligne, sur leur page fan, des photos et des vidéos, comme celles relatant la visite des jeunes enfants en visite guidée au Palais de Carthage. Des photos des personnalités présentes à la réunion de crise, du jeudi 2 février, (faisant suite aux opérations de Bir Ali), seront également disponibles sur la même page facebokienne. On verra ainsi le chef d’Etat-major des forces armées tunisiennes, le général Rachid Ammar, aux côtés du président Marzouki. Et voici qu’un communiqué historique, comme celui du samedi 4 février, annonçant la rupture avec le régime de Damas, est publié en priorité sur Facebook.

C’est dire que Facebook, adopté jusqu’au sommet de l’Etat, est désormais un acteur majeur du paysage politique tunisien. Le problème ? Les règles élémentaires de confidentialité ne sont pas respectées sur le réseau social. Les données transmises peuvent ainsi servir à des éléments étrangers, pour des usages pas nécessairement concordant avec l’intérêt de l’Etat tunisien.

L’ombre de la CIA
julian assangeJulian Assange, le fondateur de WikiLeaks, qui contribua à diffuser à grande échelle des documents top-secret touchant Ben Ali de près, ne s’y trompe pas, lui. M. Assange a même déclaré en mai 2011, que «Facebook est la plus effroyable technique d’espionnage jamais inventée». Il précise même que le réseau social constitue «la base de données la plus complète du monde sur les gens, leur nom, leurs relation, leur adresse, leur emplacement, ainsi que leurs communications avec leurs proches», avant de souligner que «toutes ces données sont  désormais accessible par les services de renseignements américains».

Dans une dépêche publiée en novembre 2011, la très sérieuse Associated Press (AP), précise même que les services de renseignements américains, suivent de très près les réseaux sociaux, en général, Facebook et Twitter en particulier. En Virginie, dans l’anonymat d’une zone industrielle, a ainsi été créée une cellule baptisée Open Source Center dépendante de la CIA, qui analyse jusqu’à 5 millions de tweets par jour. Les analystes ne négligent aucune source et se penchent sur les statuts facebook et autres articles publiés en arabe, espagnol ou en chinois mandarin. Même le contenu d’un tweet publié par tn-tweeple a priori anodin peut être décortiqué. Les pages Facebook, les forums de discussion, passent à la loupe, et les synthèses effectuées sont transmises aux services de la Maison Blanche, à Washington.

Pendant ce temps, en Tunisie, des ministres, des députés à l’Assemblée Constituante, des syndicats policiers, le ministère de l’Intérieur, et même la présidence,  continuent d’alimenter facebook en déclarations, analyses, et autres billets d’humeur croustillants. Reste à espérer que la décision de renvoyer l’ambassadeur syrien ne s’est pas (uniquement) basée sur des vidéos partagées sur les réseaux sociaux.

Walid Ben Sahbi

Facebook, du palais de Carthage à la CIA
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