Mercredi, 16 Mai 2012 21:30

tunisie-egaliteLa Tunisie est désormais un Etat de Droit. Et ce n’est pas un slogan, comme ceux que l’on entendait à l’époque "bénie" des Beni Oui Oui de Ben Ali. Et par définition, la loi est la même pour tout le monde. C’est même le pré requis à l’égalité citoyenne, et à la démocratie républicaine. Tous les Tunisiens sont donc (théoriquement) égaux en droits. Et il ne faudrait surtout pas croire les langues de vipères  persifflant que certains de nos concitoyens seraient plus égaux que d’autres.

Le lundi 14 mai, les cheikhs salafistes djihadistes marocains Abou El Fadhl Omar El Haddouchi et Mohamed Hassen El Kettani ont été interdits d'entrer sur le territoire tunisien par la police des frontières. Un groupe de jeunes sont venus spontanément les soutenir, en donnant de la voix, histoire d’encourager nos autorités à faire preuve de plus de compréhension.

D’ailleurs, on constatera qu’aucun travailleur de l’aéroport, aucune agence de voyage, aucun guichet de compagnie aérienne ne s’est plaint de l’incursion de nos frères en colère. Certes, une oreille peu habituée pourrait trouver leurs slogans peu avenants. Certes, un œil habitué à voir le rouge flamboyant, pourrait trouver menaçant leurs drapeaux noirs. Mais ce n’est qu’une (fausse) impression.

Et après tout, les quelques touristes dont on annonce le retour doivent savoir à quoi s’attendre, dans la Tunisie d’aujourd’hui, pétrie d’authenticité, et renouant avec ses racines, et son ascendance wahhabite d’Arabie Saoudite. On regrettera d’ailleurs que les deux prédicateurs aient été refoulés, et renvoyés à la monarchie alaouite. L’un de nos frères du comité d’accueil ne pourra s’empêcher de relever la flagrante injustice sur les pages dédiées à son mouvement, sur les réseaux sociaux: pourquoi interdire la Tunisie à des cheikhs maghrébins, quand Qaradhaoui, lui, a pu s’y pavaner ? On est, en effet, en droit de s’interroger sur la portée d’une telle décision. Pourquoi proscrire El Haddouchi et El Kettani, quand Tarak Zommor, impliqué dans l’effacement (définitif) de Sadate du paysage politique, a pu publiquement débattre, en décembre 2011, au cours d’une conférence historique à Tunis?

Mais les Tunisiens ont de la suite dans les idées. Et l’ouverture de l’aéroport aux manifestants risque d’inspirer les plus turbulents de nos militants. Les familles des martyrs de la Révolution et nos blessés pourraient, eux-aussi, prétendre manifester à Tunis-Carthage. Dès lors, peut-on imaginer nos jeunes se coudre la bouche, et, pourquoi pas, se faire photographier par les touristes dans le hall central de l’aéroport ? Peut-être pas. Puisque en l’occurrence, cet acte ne peut être considéré comme authentiquement tunisien. Se faire traverser le corps par des aiguilles n’est certainement pas dans nos traditions. Ceux qui s’infligent de telles mortifications, imitent à coup sûr un quelconque illuminé de Bénarès ou de Bombay, et non le Salaf El Saleh, et nos ancêtres éclairés. Et c’est d’ailleurs pour cette même et unique raison, que nos jeunes ont pu se faire rabrouer dans le ministère des Droits de l’Homme, le bien nommé. Et surtout, n’y voyez aucune inégalité.

Le 9 avril ? Si, ce jour-là, quelques passants et manifestants ont pu (malencontreusement) se faire matraquer, c’est parce qu’ils gênaient le travail des honnêtes commerçants. C’est d’ailleurs pour cela que les manifestations ont été formellement interdites à l’avenue Habib Bourguiba. Et ceux qui ont tenté d’outrepasser l’interdiction l’ont chèrement payé. Quoi de plus normal dans un Etat de droit. Car après tout, ils contrevenaient aux injonctions catégoriques du ministère de l’Intérieur. Au lieu de perturber l’activité économique de la capitale, les contestataires auraient été bien inspirés de suivre des exemples plus exaltants.  

Le dimanche 25 mars, les Tunisiens ont découvert que leur capitale s’est enrichie d’un nouvel équipement sportif, au cœur de la principale avenue : une colonne d’escalade, que des sportifs amateurs se sont empressés d’inaugurer, sous le regard bienveillant de la police et sous les yeux ébahis des passants. Une véritable attraction, démontrant au passage les prouesses dont est capable notre jeunesse, pour peu qu’on l’autorise à manifester son exubérance. Et d’ailleurs, aucun texte de loi n’interdit explicitement l’escalade de l’horloge, ni même les revendications tonitruantes à l’aéroport. Or le principe même de la loi implique que tout ce qui n’est pas explicitement interdit est autorisé. En d’autres termes, tous les citoyens Tunisiens sont libres de s’exercer à la grimpette. Et c’est tant mieux : depuis le temps que l’ascenseur social est en panne, ils apprendront ainsi à escalader les sommets à la force du poignet. Que Dieu en soit loué, et qu’il protège la Tunisie des égarés.

Oualid Chine

Tunisie : A la barbe du droit et de l’esprit des lois
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