Lundi, 06 Août 2012 06:01

mourou-beethovenLe cheikh Abdelfattah Mourou, cofondateur du Mouvement de la Tendance Islamique (MTI), l’ancêtre d’Ennahdha, a été agressé, dans la soirée du dimanche 5 août, par un extrémiste musulman, lors d’une conférence au sujet de la tolérance en Islam, à Kairouan.

Alors qu’il tentait d’apaiser les esprits, et d’argumenter pour défendre la participation de Youssef Seddik dans la conférence, un homme en jebba blanche l’a d’abord pris à partie, avant de lui lancer un verre sur le front. Maître Mourou s’est évanoui sur le choc, et sa tête s’est retrouvée ensanglantée. L’homme a été hospitalisé d’urgence, alors qu’il était censé donné une conférence sur la tolérance, en ce mois sacré de Ramadan. Un comble. D’autant plus que ce n’est pas la première fois que des salafistes s’en prennent au cheikh Mourou.

Son aisance oratoire, son éloquence, sa vivacité d’esprit, son ouverture apparente, ne plaisent manifestement pas aux plus radicaux. En mars dernier, Abdelfattah Mourou s’est fait expulsé sous la menace, de la mosquée de Kalaa Kébira, à douze kilomètres à peine de Sousse. Ce jour-là, un imam de la région l’a qualifié comme étant «sorti de l’Islam». Mourou a même précisé le 16 mars, sur les ondes de Jawhara FM, que celui qui a exigé son expulsion a lancé devant témoins : «Soit vous le sortez soit je le tue». Cette fois-là, Mourou s’en était sorti sans trop de mal, puisque il a pu sortir de la mosquée, sans être physiquement agressé.

mourou

L’origine de tant de haine ? Selon les déclarations du cofondateur d’Ennahdha, elle est à trouver dans la poésie de Schiller et la 9eme symphonie de Beethoven. Les salafistes n’ont en effet pas apprécié qu’un cheikh musulman puisse chanter, et de surcroit en allemand, sur une chaîne télé à grande audience. Qu’un cheikh puisse autant apprécier la musique, et fredonner des airs d’Ali Riahi, paraît incompatible avec la religiosité vue par les salafistes. Et ce sont ces mêmes airs de chants qui ont incité l'agresseur de ce dimanche à Kairouan, à passer à l'action. Et pour cause : selon les interprétations les plus rigoristes, la musique serait aussi un péché, la flûte dans laquelle souffle Satan pour distraire les croyants de leurs obligations…

Or comment Beethoven et ses amateurs pourraient-ils encore être respectés quand l’inculture devient une qualité ? En juin déjà, le cheikh Béchir Ben Hassen, l’un des leaders tunisiens du salafisme dit «scientifique», déclarait, dans l’une de ses leçons, que «la philosophie qui vous renverse le cerveau, est mauvaise». Il n’alla tout de même pas jusqu’à interdire la discipline d’Al Kindi ou d’Al Ghazeli, comme certains de ses frères Wahhabites d’Arabie Saoudite. Mais la couleur était déjà annoncée, par cette rhétorique interdisant toute dialectique. Allons-nous donc permettre à ce type de discours de gagner en audience, et de se développer quitte à devoir subir des arguments toujours plus frappants? La réponse est d’ores et déjà affirmative. Puisque des partis politiques salafistes, sont désormais officiellement autorisés.

Oualid Chine

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Tunisie : Mourou agressé à cause de Beethoven
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