Lundi, 03 Décembre 2012 11:13

revolution-conspiration «La Révolution Tunisienne est incontestablement authentique et admirable» affirme l’écrivain Ridha Ben Slama dans ce troisième volet de son étude intitulée «Le dromadaire de Najd». M. Ben Slama démonte ici les thèses conspirationnistes accréditant l’idée que des services secrets étrangers ont manipulé dans les coulisses le cours de la Révolution.

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Tous ces apports qui ont ciselé la personnalité tunisienne et qui cimentent l'armature de la société participent à faire de la révolution un événement à part. Car c'est une révolution authentique qui s'est déclenchée et qui doit franchir ses différentes étapes dans un processus inédit. Les lenteurs, les obstacles et les manœuvres d'arrière-garde perpétrées par certains apprentis politiciens ne doivent pas refroidir les enthousiasmes ni démoraliser les Tunisiens. Il faut bien comprendre que la Tunisie est actuellement « convalescente », après un traitement de choc prédateur sur deux décennies au moins et la gestion actuelle n'aident au rétablissement escompté, au contraire. Ajoutons les campagnes interminables de quelques commentateurs et "experts" qui s'obstinent à démontrer que ce n'est pas une révolution mais un coup d'Etat téléguidé par une superpuissance et exécuté par ses auxiliaires, dénigrant les luttes menées par des Tunisiens tout au long de ces années et ôtant au peuple tunisien toute aptitude à être le maitre de son destin.

Ces glossateurs du dénigrement, ergoteurs déprimés avancent masqués, ils  chicanent à longueur de pages ou "cathodiquement" avec une logique argumentative restrictive, pour des raisons variées mais discernées par celui qui discerne leurs motivations et leurs procédés. La Révolution Tunisienne est incontestablement authentique et admirable. Tout ce qu'ils avancent, comme faits et gestes pour accréditer l'idée qu'elle n'en est pas une, ne sont en fait que des actes entrepris par des parties tunisiennes et étrangères après coup pour se positionner par rapport à elle, soit pour tirer avantage ou bien pour la contrecarrer. Il y a même ceux qui s'échinent à prouver que les préparatifs datent depuis des années et que les instigateurs, services étrangers et collaborateurs tunisiens formés par des agences occultes, n'attendaient que le moment propice. Ils se réfèrent aux « révolutions » formatées dans les pays postcommunistes pour se défaire de la domination soviétique qui avaient bénéficié d'aides extérieures et notamment de soutiens financiers, suggérant une implication du gouvernement américain.

Tous les services spéciaux du monde et davantage encore ceux des puissances disposent de plans préétablis pour intervenir et peser sur les événements afin de protéger ou consolider leurs intérêts, ils anticipent des ­stratégies et montent des opérations. Ceci ne signifie nullement qu'ils sont omnipotents et omniprésents à ce point ! Cette vision conspirationniste, notamment pour ce qui concerne la Révolution Tunisienne, réduit le cours des événements à l’action de groupes occultes qui tirent les ficelles en coulisses et qui sont les deus ex machina de l’histoire apparente, réduisant à la portion congrue de simples comparses les milliers de citoyens qui ont défié la machine répressive. En vérité, cette thèse ne résiste pas à une analyse rigoureuse dans le cas tunisien et succombe vite à l'écueil de la paranoïa. Cela ne signifie pas pour autant que ces officines qui œuvrent pour des puissances étatiques n'ont pas commis de crimes, n'ont pas fomenté de coups d'Etat et n'ont pas provoqué des guerres.

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La période charnière que vit le peuple tunisien constitue, avec tous les griefs que chacun connait, un mieux indiscutable. Toutefois, elle entraine également une perte de repères pour le Tunisien et contribue à amplifier le doute de soi et la consternation face à une gouvernance transitoire qui a failli à sa mission, et par là, elle fragilise son immunité contre les tentatives d'inoculer de nouveau le germe du despotisme et du totalitarisme, outre les ingérences étrangères. Le peuple tunisien a aujourd'hui le pouvoir, mais il a besoin d'une vérité pour l'exercer et de sens pour conduire ses actes, surtout quand les choses vont aussi mal. Quoi qu'il en soit, ces désinformateurs patentés ne réussiront pas à nous gâcher notre bonheur vécu intensément ce vendredi 14 janvier 2011, ou à tenter de nous réduire à regretter une dictature mafieuse. Quelle est belle la chute d'un dictateur répugnant comme celui que nous avions subi durant 23 ans !

Le processus engagé en 2011 a avancé avec cet esprit innovant tunisien : première transition, Kasbah I, Kasbah II, deuxième transition, élections. Il faut reconnaitre que l'étape transitionnelle était assurément révolutionnaire, elle était marquée par l'enthousiasme avec une activité foisonnante et une vitalité créative des différents acteurs politiques et sociaux. Le processus révolutionnaire fonctionnait malgré tout. La Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique en avait représenté à la fois la boîte à idée et la caisse de résonnance. La première transition offrait les élections du 23 octobre 2011 qui clôturèrent cette étape. Le peuple tunisien se retrouve devant un exercice souvent différé, tellement espéré, mais aussi redouté face aux risques encourus.

Et la révolution « généreuse » donna une opportunité à ce courant qui se réclame de l'islamisme pour lui permettre de prouver sa capacité à être un parti politique comme les autres et qui se plie aux mêmes règles. Pourtant, il a été légalisé alors que des signes montraient ses velléités de vouloir établir une société théocratique. Son comportement et les déclarations de ses dirigeants démontrent qu'il se ferait l'outil destiné à mettre en miette le système qui lui a permis de prendre le pouvoir à travers un processus électoral.

Ridha Ben Slama

Auteur de :

  • Libertés fondamentales et mode de corruption des systèmes- Editions Thélès- France – février 2010.
  • Le Songe Massyle, Roman historique, TheBookEdition, janvier 2011.
     

Du même auteur sur Mag14:

Tunisie : Conspirateurs et détracteurs de la Révolution (3/5)
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