Jeudi, 06 Février 2014 15:00

Tribune. Qu'ils soient Tunisiens ou membres d'une officine étrangère, ou les deux. Nous voulons savoir, le peuple de la révolution veut savoir qui a cru, en tuant un, puis un autre de ses fils, pouvoir le terroriser, le faire rentrer dans la cage qu'on lui a toujours destinée, et dont il a brisé les barreaux. Par Gilbert Naccache

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Un an ! Cela fait seulement un an et il s'en est passé des événements, au point qu'on a l'impression que des années se sont écoulées, depuis l'odieux assassinat de Chokri Belaïd !

Et pourtant, nous n'avons rien oublié, nous continuons à réclamer des noms : qui étaient les commanditaires de ce crime impardonnable, et peut-être de celui, non moins atroce, du 25 juillet, le meurtre de Mohamed Brahmi.

Peu importe que ce soit un ou plusieurs commanditaires, peu importe qu'ils soient Tunisiens ou membres d'une officine étrangère, ou les deux. Nous voulons savoir, le peuple de la révolution veut savoir qui a cru, en tuant un, puis un autre de ses fils, pouvoir le terroriser, le faire rentrer dans la cage qu'on lui a toujours destinée, et dont il a brisé les barreaux.

Depuis ce matin de février 2013, bien des choses se sont produites, des gouvernements sont tombés, des immenses manifestations de refus des méthodes terroristes ont eu lieu, des compromis minables ont permis que le faux-défunt RCD sorte son vilain museau de la boue où il se terrait et que ses aboyeurs pleins ce morgue défient la révolution et se posent en sauveurs : la justice transitionnelle, qui aurait dû leur faire fermer leur clapet n'est toujours pas là...

Mais, à côté de l'assassinat de Mohamed Brahmi, à côté des tergiversations du gouvernement Laâridh et à son refus de tirer les conclusions de son incapacité à arrêter les assassins, voire de sa complicité au moins passive, à côté des exposions terroristes du Chaambi et d'ailleurs, habilement utilisées pour réhabiliter des forces de l'ordre qui n'ont toujours pas rendu des comptes pour les exactions de la période de la révolution, parmi lesquelles les pratiques demeurent inchangées, dépassements divers, abus de pouvoir, torture, agressions sexuelles... à côté de cela, et de bien d'autres choses, la révolution n'a pas baissé les bras.

Ils ont beau s'auto-décerner généreusement la responsabilité de la fin heureuse de l'écriture de la constitution : celui-là qui, il n'y a pas bien longtemps, appelait à la dissolution de l'assemblée constituante et à la rédaction par des experts d'un texte corrigeant la constitution de 1959, se vante aujourd'hui d'avoir menacé Nahdha de la dégager par la force et d'avoir ainsi pesé sur ses décisions. Mais de quelles forces dispose-t-il donc et pourquoi ne les a-t-il pas utilisées au lieu de menacer ? Il a manipulé les jeunes du sit-in du Bardo, mais il n'a pu que négocier un petit arrangement avec Nahdha, permettant aux destouriens de tous acabits de revenir sur la place publique...

De leur côté, les partis de l'opposition, comme les acteurs de la société civile attribuent à leur obstination, à leur fermeté, à leur patience d'avoir obtenu un compromis aussi large. Ne parlons pas des interventions étrangères, des invitations à tourner cette page pour que l'aide afflue. La Nahdha, à son tour, s'attribue le mérite d'une victoire à la Pyrrus : si elle n'avait pas changé d'attitude, certes rien n'aurait été fait. Mais pourquoi a-t-elle changé d'attitude ? Le saint esprit l'aurait-il brusquement touchée ? Ne serait-ce pas plutôt la conséquence de l'analyse de la défaite des frères musulmans en Égypte, et par conséquent des islamistes à l'échelle internationale ? N'ont-ils pas compris que leur seul salut était de ne pas se couper de la révolution, de ne pas vouloir à tout prix faire leur propre politique, car elle les isolerait, comme elle avait commencé à le faire, comme elle a isolé Morsi, et permettrait leur écrasement ? Ont-ils désormais un choix autre que d'aller dans le sens de la révolution, même s'ils espèrent encore trouver un arrangement avec ses ennemis ?

En réalité, le peuple qui a mis fin au régime du parti unique, ce peuple qui veut que l'on s'occupe de satisfaire ses revendications au lieu de passer son temps à réaliser des calculs égoïstes de partis ou de fractions, ce peuple n'a rien oublié depuis l'année dernière, ce peuple qui a osé l'impensable en décembre 2010-janvier 2011, ce peuple sur qui continue de s'abattre la répression, ce peuple, qu'on ne peut tromper par des pseudo-victoires sur le terrorisme, par l'effacement brutal des témoins, ce peuple réclame aujourd'hui, dans un seul cri : QUI A TUE CHOKRI ?

GN

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